Avions à hydrogène : une fausse bonne idée

Le 22 septembre, le journal ”le Monde titrait” : « Airbus ambitionne de commercialiser un avion à hydrogène en 2035. » Annonce alléchante, mais qu’en est-il de sa réalisation effective ? Est-elle compatible avec l’orientation « écologique » impulsée par l’Union européenne ?

LE TRANSPORT aérien (avec l’automobile) est de loin le plus énergivore et émetteur de gaz à effet de serre par passager par kilomètre. Pour des raisons environnementales et physiques, le secteur de l’aviation se sait menacé s’il ne se transforme pas radicalement afin d’atteindre une gestion plus « verte » et « durable » de sa consommation énergétique. Airbus a choisi le dihydrogène bas carbone, mais la France pourra-t-elle satisfaire sa part d’approvisionnement ?

Récemment, Bruno Le Maire a vanté le choix de l’électrolyse pour y parvenir. C’est une option envisageable, encore faut-il que l’électricité provienne de ressources énergétiques bas carbone telles que l’hydraulique, la biomasse, le nucléaire, l’éolien, le solaire ou bien le photovoltaïque…

Supposons que cela soit le cas. La chaîne de production du dihydrogène par électrolyse de l’eau a un rendement assez bas : entre le transport de l’électricité (perte de 2-3 %), la réaction d’électrolyse (perte de 20 %), sa compression-liquéfaction (perte de 20 %), son transport (perte de 1 %), ainsi que les pertes d’étanchéité (perte de 10 %), le rendement de sa production plafonne à moins de 55 % (en ordre de grandeur).

Par comparaison, le rendement de la chaîne de production du kérosène est estimable à 80 %. Or une turbine à gaz fonctionnant à l’hydrogène a un rendement similaire à celui des turboréacteurs à kérosène actuels. Cela signifie donc qu’il faut 43 % d’énergie de plus pour produire le carburant à partir d’électricité plutôt qu’à partir de pétrole brut.

En France, en 2018, le secteur du transport aérien a consommé environ 87 TWh d’énergie finale (donc de kérosène), ce qui représente environ 4,3 milliards d’euros hors taxe. D’après la proportion calculée ci-dessus, il faudrait alors une capacité de production d’électricité en amont d’environ 155 TWh par an. Et 155 TWh par an d’électricité en plus, c’est équivalent à l’exploitation :

— de 96 % du potentiel électrique éolien de la France,
— de 2,2 fois le potentiel hydroélectrique de la France,
— de 37 200 éoliennes (soit environ 29 200 éoliennes de plus qu’aujourd’hui),
— de 33 % de la surface forestière française dans des centrales à biomasse [1],
— d’un champ de photovoltaïque presque égal à la superficie du Grand Paris,
— de 15 réacteurs nucléaires de 1 450 MW, soit 36 % de la puissance du parc actuel.

La France ne pourrait donc satisfaire cette demande en hydrogène qu’à la condition de déployer des capacités de production d’énergie renouvelable pharaoniques et extrêmement coûteuses… ou bien de déployer de nouveaux réacteurs nucléaires, dont l’électricité produite est la moins chère.

En se basant sur le coût de l’électricité d’origine nucléaire (environ 50 €∕MWh), le coût du carburant pour le secteur aérien en 2018 aurait été de 7,7 milliards d’euros hors taxe, soit une augmentation d’au moins 79 % par rapport au kérosène (et sans compter le coût de conversion électricité-hydrogène). La biomasse engendre un surcoût de 180 %. Avec une électricité d’origine éolienne, cette augmentation bondit à 250 % du prix du carburant ; à 500 % pour du photovoltaïque.

Au bout du compte, quel que soit le mode de production d’électricité sélectionnée, l’avion à hydrogène bas carbone ne pourra se substituer à la flotte d’avions actuelle sans une augmentation du prix des billets, une diminution du bénéfice des entreprises du secteur et sûrement une diminution du trafic aérien. Ces effets seront d’ailleurs d’autant plus importants que l’électricité sera d’origine éolienne et solaire.

C’est malheureusement vers ces deux dernières sources d’énergie que l’Union européenne veut réorienter la production française. La récente fermeture de la centrale nucléaire de Fessenheim en est une illustration (bien que cela ait eu pour conséquence immédiate la réouverture de centrales… à charbon !). Il est temps pour Airbus de se demander si ses ambitions environnementales n’entrent pas en contradiction avec les injonctions de l’Union européenne…

Maxime AMBLARD
Commission Énergie

1. En considérant une capacité énergétique de 5 tep par hectare de forêt par an et un rendement de 50 %.

Pour consulter ce communiqué hors-ligne, télécharger le PDF : CP – Avions à hydrogène 2020-09-25

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