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Les enseignements du programme de stabilité budgétaire de la France
Front populaire, le 16 mai 2023
Charles-Henri Gallois
Président de Génération Frexit
LE 20 AVRIL 2023, en toute discrétion, la France a envoyé à Bruxelles son programme de stabilité 2023-2027. Il a été présenté en Conseil des ministres le 26 avril 2023. L’élève a bien présenté sa copie au maître. Cette séquence rappelle le cirque annuel du Semestre européen : la publication du Programme national de réforme (PNR) à la suite de l’émission des fameuses « recommandations » de la Commission européenne (les « grandes orientations des politiques économiques » ou GOPÉ).
Ces séquences rappellent sans cesse la soumission de la France en ce qui concerne sa politique économique et sociale. On nous avait expliqué lors des débats sur le traité de Maastricht que la France perdrait certes sa politique migratoire et monétaire mais qu’elle conserverait sa politique budgétaire. On voit bien désormais que celle-ci est décidée à Bruxelles, que le gouvernement élu soit de droite (Meloni ou Sarkozy) ou de gauche (Hollande ou Tsipras), tout comme d’extrême centre (Macron)
Venons-en maintenant au fond. Il est toujours intéressant de voir ce qui est dit, mais aussi ce qui n’est pas dit, dans ce genre de documents.
Premier élément : hausse d’impôts en 2025
Emmanuel Macron promettait encore hier au 20 h de TF1 une baisse d’impôts pour les classes moyennes. On a l’impression que cela fait un an que Gabriel Attal nous parle de « plan Marshall pour les classes moyennes », lesquelle ne voient rien venir, si ce n’est une baisse constante de leur pouvoir d’achat et de leur niveau de vie. On ne retrouve aucune trace de cette baisse d’impôts dans le document.
Pire encore, les prélèvements obligatoires vont augmenter de 8 milliards d’euros en 2025 (0,3 point de PIB), comme le montre le tableau ci-dessous. La ressource de cet impôt ou taxe n’est pas précisée.
Peut-être le romancier Bruno Le Maire pourra-t-il nous expliquer de quel nouvel impôt il s’agit. On peut cependant douter de sa faculté à le faire alors qu’il affirmait récemment dans une interview que l’État ne se faisait pas de gras sur l’inflation.
Inflation : «L’Etat ne se fait pas de gras sur la hausse des prix», assure Bruno Le Maire https://t.co/qkHPYFHfa1
— CNEWS (@CNEWS) May 12, 2023
C’est vite oublier que plus un prix est élevé et plus l’État gagne mécaniquement de la TVA. Bruno Le Maire, d’après ses écrits, semble être davantage un expert en dilatation qu’en inflation. Pourquoi pas, mais est-ce ce que l’on attend d’un ministre de l’Économie ?
Deuxième élément : confirmation que la réforme des retraites est une demande de l’UE
Lors du passage en force de la réforme des retraites, il a très peu été question de l’Union européenne. Un petit peu comme Voldemort dans Harry Potter : on avait l’impression qu’il s’agissait du nom qu’il ne fallait absolument pas prononcer. Le peu de fois où le sujet est venu sur la table, le gouvernement a nié en bloc et les curés du « fact-checking » ont fait des contorsions pour expliquer que la réforme des retraites n’était pas exigée par l’UE.
Ceux qui me suivent savent que c’est le contraire qui est vrai. Je l’ai expliqué aussi bien sur ma chaîne YouTube que sur Front populaire : la réforme des retraites était une contrepartie obligatoire du plan de relance de l’UE.
Ce document vient confirmer cela.
Il détaille les principales mesures du plan national de relance et de résilience (PNRR) qui visait précisément à répondre aux réformes exigées pour pouvoir toucher les fonds du plan de relance. Parmi ces réformes détaillées, on retrouve bien sûr la réforme de l’assurance-chômage et, miracle, celle des retraites. C’est exactement ce que j’expliquais depuis l’accord de ce poison de « plan de relance » de l’UE.
On a d’ailleurs vu début mai la Commission européenne suspendre les fonds pour la Belgique dans l’attente de leur réforme des retraites. La preuve par les faits ! Vous comprenez désormais pourquoi Emmanuel Macron a voulu passer coûte que coûte cette réforme des retraites, malgré une opposition massive du peuple français.
Troisième élément : le coût faramineux du bouclier tarifaire sur l’électricité
Cela fait des mois que j’alerte au sujet de cette gabegie. Les chiffres en jeu sont bien plus importants que les prétendues économies de la réforme des retraites. J’avais estimé le coût total de ce bouclier à 45 milliards d’euros. Je n’étais vraiment pas loin de la vérité puisque le gouvernement l’estime lui-même à 47,5 milliards d’euros.
Pourquoi est-ce une gabegie ? C’est un coût totalement inutile. Le gouvernement paie pour faire baisser le prix final de l’électricité pour les particuliers et une poignée d’entreprises. Mais le coût réel de notre production d’électricité, grâce au nucléaire, est très inférieur au prix libre du marché de l’électricité de l’UE. En d’autres termes, l’État subventionne un surcoût qui est lié uniquement à la méthode de calcul de ce marché. Notons par ailleurs que ce bouclier ne protège même pas l’immense majorité des entreprises, qui voient leurs coûts exploser. Plutôt que de claironner une réindustrialisation fictive, le gouvernement ferait mieux de se préoccuper de la saignée qui résulte de cette énergie hors de prix.
Pour résumer, le gouvernement, par manque de courage et dogmatisme, a préféré payer 47,5 milliards d’euros plutôt que de sortir de ce marché de l’électricité de l’UE. Rappelons au passage que ne pas être dans ce marché n’empêche pas les interconnexions, comme c’est le cas de la Suisse. Le gouvernement n’a donc aucune excuse. Ils attendent une réforme au niveau de l’UE depuis un an et demi. En attendant, des entreprises font faillite et les finances publiques sont saccagées. Il est assez irritant de voir ensuite la Macronie donner des leçons de responsabilité et de bonne gestion.
Quatrième élément : ce qui n’est pas dit
Il est aussi intéressant de se pencher sur ce qui n’est pas dit ou mis sous le tapis. La dissimulation montre finalement parfaitement le biais idéologique et en l’espèce la mauvaise foi.
Il y a un silence pudique quant au coût futur des emprunts indexés sur l’inflation. Le coût de 2022 est brièvement évoqué et puis plus rien. C’est regrettable pour un document qui traite des finances publiques et de la trajectoire économique du pays. Le coût estimé pour 2023 sera d’au moins 14 milliards d’euros et la perte latente globale est toujours de 49 milliards d’euros. On peut légitiment penser que le gouvernement ne souhaite pas s’étendre sur cette bourde de gestion qui représente sans doute le plus grand scandale d’État de la Ve République au regard des pertes en jeu.
Il n’y a rien non plus sur la future taxe carbone, décidée par l’UE, qui va siphonner les recettes fiscales françaises actuelles et ajouter des taxes aux particuliers. Cela coûtera tout de même dans un premier temps en moyenne 157 euros par personne, puis ensuite 337 euros par personne à partir de 2030.
Encore plus surprenant, il n’y a strictement rien concernant le coût exponentiel de notre appartenance à l’UE. On a bien sûr en tête la contribution budgétaire nette directe qui était quasiment inexistante en 1999 (400 millions d’euros) et qui est désormais de 12,4 milliards d’euros. Celle-ci va continuer à croître dans les années à venir, a fortiori avec la volonté d’intégrer au plus vite les pays des Balkans et l’Ukraine.
Je suis également abasourdi par l’absence totale de mention du coût du plan de relance de l’UE pour la France. Ce fameux plan de relance devra être remboursé et cela aura un coût pour la France, que ce soit via les prétendues « ressources propres » ou via une contribution budgétaire directe. Pour toute dépense de l’UE, la France paie 17,4 % du montant. Les conditions d’emprunt ont en plus largement changé depuis 2020 et l’accord du « plan de relance ».
Je pensais naïvement que l’UE aurait emprunté la totalité des 807 milliards d’euros dès 2020 , les taux étant négatifs ou nuls. Eh bien non, ces génies ont eu la bonne idée n’en emprunter qu’une petite partie, de telle sorte que, au début de 2023, il restait 636 milliards d’euros à emprunter. Si l’on prend pour le reste à emprunter un taux moyen très généreux de 2,5 % à 20 ans, le coût des intérêts à rembourser sera de 173 milliards d’euros. Le coût total de l’emprunt à rembourser ne sera donc pas uniquement les 807 milliards d’euros de capital mais 807 + 173 milliards d’euros.
Si l’on part du principe que la France ne va participer au remboursement que des subventions directes aux pays (338 milliards d’euros), des autres programmes (83 milliards d’euros) et des intérêts (173 milliards d’euros), sa quote-part à payer représente 103 milliards d’euros. Pour n’en recevoir que 37 milliards ! Le coût net du plan de relance pour la France sera donc au minimum de 66 milliards d’euros. 66 milliards d’euros pour se voir en plus imposer la réforme des retraites et celle de l’assurance-chômage ! Idéologie européiste et bourde de gestion de l’UE, on comprend mieux le silence sur le coût du plan de relance dans ce document.
Quand on lit ce document et la triste copie de l’élève au maître, on se dit qu’il est urgent que nous reprenions le contrôle en obtenant un référendum sur l’appartenance de la France à l’Union européenne !